Char à voile : 200 km/h propulsé par le vent

Longtemps, le vent a été la seule force de propulsion permettant d’aller loin et suffisamment vite. Les hommes ont rapidement trouvé le mode d’emploi pour naviguer à la voile autour du monde. Puis ils sont allés de plus en plus vite, jusqu’aux « bateaux » d’aujourd’hui capables de vitesses ahurissantes. Le record est détenu depuis 2012 par Vestas Sailrocket avec une pointe à 121,6 km/h. Mais aujourd’hui, les membres du Team New Zealand de l’America’s Cup envisagent d’aller à plus de 200km/h grâce à la seule force du vent…

L’équipe de design team de Team New Zealand est en effet en train de travailler sur un engin de vitesse capable de battre tous les records. Mais il ne s’agit pas d’un foiler et encore moins d’un monocoque aujourd’hui utilisé pour courir la fameuse America’s Cup. Les “néo-zed” veulent battre le record absolu de vitesse et pour cela ils ont choisi de construire… un char à voile !

Char à voile
Le char à voile d’aujourd’hui : un engin capable de dépasser les 100 km/h et d’aller à trois fois la vitesse du vent… (photo : DR)

Le char à voile, machine à provoquer l’adrénaline…

Tous ceux qui ont – un jour – eu la chance de piloter un char à voile connaissent les sensations incroyables que peut délivrer l’engin. Sur un char à voile de Classe 3, la surface de voile + mât ne dépasse pas 7,35 m2 et le poids minimum est de 100 kg. On peut atteindre trois fois la vitesse du vent et dépasser allègrement les 100 km/h… Et à 100 km/h sur une plage, les sensations sont vraiment au rendez-vous. C’est simple, il n’y a pas grand-chose de comparable à part les 60 pieds ORMA ou les foilers d’aujourd’hui.

Un peu d’histoire

La meilleure preuve que cet engin est capable de plaire aux plus grands amateurs de sensations fortes vient de Louis Blériot. Le fameux aviateur, qui fut le premier à traverser la Manche sur un avion de sa conception (le 25 juillet 1909), aimait par-dessus tout se détendre le week-end en pilotant les chars à voile qu’il développait sous le nom commercial d’Aéroplage… Tout un programme !

aéroplage
Louis Blériot aimait utiliser son aéroplage à Hardelot entre deux records en aviation

Avant même la Première Guerre Mondiale, des compétitions de char à voile sont organisées sur les plages du nord de la France, mais aussi de Belgique, d’Allemagne, etc. Dans les années 50, ce qu’on appelait depuis le début du siècle le « sand yachting » aux USA devient un sport qui connaît un engouement certain. Et dès que la compétition entre en jeu, les progrès viennent rapidement. Dans les années 60, les chars à voile sont déjà équipés de mât-ailes et de voiles très plates avec des lattes forcées qui permettent d’aller très vite. Le moteur, c’est le vent apparent.

Un record à battre

Le record actuel appartient au britannique Richard Jenkins qui, sur son engin baptisé « Greenbird », a atteint la vitesse de 202,9 km/h le 26 mars 2009. Le jour du record, le vent oscillait entre 48 et 80 km/h dans le lac salé d’Ivanpah en Californie (USA).

Greenbird
Greenbird, l’actuel engin le plus rapide au monde propulsé par le vent : 202,9 km/h

C’est donc à ce record que va s’attaquer Team New Zealand, avec une équipe de designers à faire rêver (Guillaume Verdier, Romaric Neyhousser, Benjamin Muyul, Jeremy Palmer, Romain Gard, Tim Meldrum, Sean Regan, Adrian Robb, Jarrod Hammond et Dave French) et un pilote hors norme, puisque c’est Glen Ashby qui devrait occuper le poste de commande. Pour les SEAtizens qui ne le connaissent pas, Glen Ashby c’est : 3 America’s Cup – une médaille d’argent en Tornado aux JO de 2008 et… 17 championnats du monde dans 4 classes de bateaux différentes. Excusez du peu !

Un char à voile… finalement assez classique

Avec un design team aussi prestigieux, on pouvait s’attendre à un engin vraiment exceptionnel. Mais, comme Glen Ashby nous l’a expliqué : « avec toute l’équipe, nous avons exploré des concepts assez créatifs et innovants pour aller vraiment plus vite. Mais à la fin, nous sommes arrivés à un engin relativement similaire dans le concept au détenteur du record existant, ce qui a vraiment démontré que battre (ce record) sera un énorme défi. Comme nous n’avons pas trouvé de solutions miracles en termes de conception, et tout à fait comme ce qui nous attend avec la 37e America’s Cup et la prochaine génération d’AC75, les gains se résumeront à de petites améliorations… Et comme pour la Coupe de l’America, nous devons simplement faire mieux à tous les niveaux en utilisant notre expérience, nos compétences et nos outils acquis en équipe à ce jour ».

Char à voile de la Team New Zealand
Quadruple vainqueur de l’America’s Cup et actuel détenteur du trophée, Team New Zealand se lance dans le record absolu de vitesse à la voile… avec un char à voile !

Mais ce record n’est pas inutile pour le détenteur du plus vieux trophée sportif encore en jeu (la première America’s cup se déroule régulièrement depuis 1857). Le char à voile ira beaucoup plus vite que n’iront jamais les bateaux de la prochaine Cup. Et avec ces vitesses viennent de nombreuses complexités qu’il faudra absolument résoudre. Des solutions qui pourraient faire avancer le bateau de Team New Zealand.

Rendez-vous en juillet/août 2022 sur le lac salé de Gairdner en Australie pour suivre la tentative de record. En espérant que le vent sera de la partie…

A suivre sur : https://emirates-team-new-zealand.americascup.com/

Pour en savoir plus sur l’usage du vent dans la navigation : voir notre article sur la propulsion des navires par le vent

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