Le sable, une ressource en danger ?

Début septembre 2023, l’ONU a publié une étude estimant un chiffre crédible sur l’extraction du sable des océans. 6 milliards de tonnes en moyenne y sont extraites chaque année. Un chiffre qui approche dangereusement les capacités de régénérescence de cette matière première indispensable à notre manière de vivre…

La quantité de sable extraite, que ce soit en bord de plage ou au fond des océans, devient critique, alerte une étude de l’ONU (Photo : Pexels-Maria Isabella Bernotti)
La quantité de sable extraite, que ce soit en bord de plage ou au fond des océans, devient critique, alerte une étude de l’ONU (Photo : Pexels-Maria Isabella Bernotti)

Le sable, une ressource commune et facile à exploiter

Le sable, on le retrouve dans le béton de nos immeubles et de nos maisons, dans le verre de nos bouteilles, de nos fenêtres ou dans les panneaux solaires, mais aussi dans les routes et les circuits de nos ordinateurs… C’est la ressource la plus extraite chaque année, juste après l’eau et bien plus que n’importe quelle énergie fossile ou biomasse. Le sable est la base de nos sociétés, sans même que nous nous en rendions compte. 

L’ONU estime ainsi que 50 milliards de tonnes de sable et de gravier sont utilisées chaque année par l’homme. Mais la question a longtemps été de savoir quelle part de ce sable provenait des océans. Pour avoir enfin une réponse précise à cette question, la division scientifique du Programme des Nations Unis pour l’Environnement a fait appel à l’intelligence artificielle et au système d’identification des navires qui permettent de les localiser automatiquement. Si la méthode a ses limites – seuls 50% des navires sont actuellement suivis et l’extraction le long des côtes n’est pas encore prise en compte – le résultats de l’étude est très parlant : entre 4 et 8 milliards de tonnes de sable et sédiments sont extraits chaque année des océans soit, en moyenne, 6 milliards de tonnes ou l’équivalent d’un million de camion par jour.

L’exploitation sans retenue du sable des fonds marins est une des raisons de l’érosion des plages… (Photo : Pexels Oliver Sjöström)
L’exploitation sans retenue du sable des fonds marins est une des raisons de l’érosion des plages… (Photo : Pexels Oliver Sjöström)

Ce chiffre, assez effarant, doit être mis en parallèle avec les 10 à 16 milliards de tonnes de sédiments que les fleuves et rivières charrient dans les océans pour les recharger chaque année. 

La tendance, sur la période 2012/2019, étant à une augmentation continuelle, la courbe de l’extraction devrait rapidement croiser celle du renouvellement naturel. C’est déjà le cas dans de nombreuses régions qui ont fait de l’extraction du sable une industrie rentable.

Le sable, essentiel dans nos sociétés mais tout aussi indispensable à l’écosystème marin

Une étude parue dans Science en 2017 alertait déjà sur la tragédie imminente et annoncée concernant l’extraction du sable et ses conséquences désastreuses. Cette étude expliquait qu’entre 1900 et 2010 le volume global de ressources naturelles utilisé dans la construction et les infrastructures de transport avait été multiplié… par 23 ! Et le sable et sédiments en représentaient 79%. 

Un “navire-aspirateur” extracteur de sable en action (extrait d’une vidéo)
Un “navire-aspirateur” extracteur de sable en action (extrait d’une vidéo)

Le problème, en plus de la quantité extraite, réside aussi dans la manière dont le sable est récupéré par des navires-usines extracteurs qui aspirent littéralement le sable et broient tout sur leur passage. Tout est avalé, les micro-organismes disparaissent ne laissant qu’un espace vierge et stérile. Mais ce n’est pas tout : en prélevant tout sur leur passage, ces « aspirateurs géants » laisse un grand vide, qui est rapidement comblé par le sable et les sédiments qui sont dans les zones voisines. Jusqu’aux plages qui sont confrontées, pour 90% d’entre elles, à un phénomène d’érosion qui ne serait donc pas uniquement dû à la montée des eaux. CQFD !

Quelles solutions pour limiter les dangers de l’extraction du sable ?

D’après l’ONU, les lieux où l’extraction du sable sont les plus importants sont situés en mer du Nord, en Asie du Sud-Est et sur la côte Est des USA. La Belgique, qui possède l’une des flottes les plus importantes d’extraction de sable, n’a plus que 80 ans de ressources à disposition en mer du Nord au rythme de son exploitation actuelle. 

La demande continuant à croître, la ressource à diminuer, il va donc forcément y avoir un problème, alerte l’ONU.

Certains pays (le Cambodge, l’Indonésie, la Malaisie, la Thaïlande et le Vietnam) l’ont bien compris et interdisent déjà l’exportation de cette denrée qui pourrait, rapidement, devenir très stratégique. Mais la plupart des pays n’ont aucune législation concernant l’exploitation et l’exportation du sable. 

Pire, aucun pays n’a pour l’instant légiféré concernant les méthodes d’extraction autorisées afin de limiter – au moins – les dégâts collatéraux faits à la faune et à la flore sur les lieux d’extraction. 

L’ONU appelle donc, via son Programme des Nations Unies pour l’Environnement (PNUE) à mettre en place une réglementation internationale pour contrôler l’extraction, définir des méthodes de dragage et protéger des zones, notamment près des plages pour limiter les effets délétères de l’exploitation sauvage du sable. Enfin, l’ONU préconise que le sable soit reconnu comme une denrée stratégique et non plus comme un vulgaire matériau commun dont nous pouvons jouir à volonté.

Chiche ?

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