On dit souvent que 80% des déchets retrouvés en mer sont rejetés depuis les terres. Un chiffre qui ne repose pas vraiment sur des données fiables. Un rapport publié fin 2021 analyse l’origine des déchets retrouvés en mer. Les auteurs, un groupe d’experts scientifiques de la protection de l’environnement marin (GESAMP), ont été nommés par les Nations Unies pour mener une enquête précise sur le sujet. Et l’objectif est de mieux comprendre comment les déchets (notamment plastiques) se retrouvent dans les Océans. Les solutions proposées par ce rapport pourraient ainsi permettre de contribuer à traiter le problème à la source.
La pêche et l’aquaculture dans le viseur
Le rapport pointe en premier lieu le monde de la pêche. En effet, les matériels de pêche (lignes, filets, hameçons, bouées etc…) perdus, abandonnés ou jetés représentent une part importante de ces déchets. On évoque souvent le chiffre de 640 000 tonnes par an même si celui-ci est difficile à prouver.
L’aquaculture est également une source importante de pollution des océans au micro plastique, car une bonne partie du matériel utilisé est d’origine plastique et se détériore dans l’eau. Le secteur perd aussi du matériel en mer après des tempêtes ou des accidents. Mais, il n’existe que des estimations très grossières de la quantité de déchets liés à l’aquaculture. Par exemple, dans les eaux de l’espace économique européen, les déchets sont estimés entre 3 000 et 41 000 tonnes par an…
Le transport maritime n’est pas en reste
Le transport maritime et la navigation de plaisance sont également pointés du doigt. La part du commerce maritime international a augmenté de 3% par an entre 1970 et 2017. L’OMI (Organisation maritime internationale) a recensé en 2021 pas moins de 53 000 navires marchands en circulation, toutes spécialités confondues. Des chiffres qui laissent entrevoir l’ampleur des dégâts potentiels.
Concernant les types de déchets rejetés en mer par ces navires, on compte des objets plastiques issus des ordures ménagères, des micro plastiques présents notamment dans les eaux grises et les ballasts, ou encore des épaves flottantes perdues lors d’opérations de navigation. S’ajoutent à cela de nombreux autres déchets de sources diverses.
Parmi les causes principales, le rapport souligne les intempéries, les conflits internationaux ou encore les erreurs humaines lors des opérations de transports (pertes de conteneurs). Sans compter l’abandon de certains navires, dont le phénomène s’accroît dans certaines régions côtières.
Les autres sources de déchets
Les boues de dragage dans certaines zones côtières ou estuaires représentent la part la plus importante des déchets marins en termes de volume et de tonnage. En effet, chargées de micro plastiques et d’autres déchets solides, ces boues sont souvent simplement rejetées à la mer, sans qu’elles soient ni traitées ni filtrées.
Pour être complet, le rapport estime que l’on peut aussi prendre en considération les pertes liées à l’activité aérospatiale, l’exploration gazière, minière et pétrolière offshore, les filets barrages anti-requins, la surveillance météorologique, les récifs artificiels, la recherche scientifique, ou encore… les feux d’artifice.
Quelles sont les conséquences des déchets en mer ?
Les effets de la multiplication des déchets, notamment plastiques, sont multiples, explique le rapport. Ils sont d’abord sociétaux, puisqu’ils causent une détérioration de l’esthétique des zones contaminées, mais présentent aussi des enjeux de sécurité publique.
Ensuite, les conséquences économiques sont également importantes. En effet, les pertes financières liées à un tourisme décroissant sont parfois non négligeables. Les dommages causés aux navires et aux engins et installations de pêche, et donc les pertes financières associées, ou encore les frais de nettoyage, sont également des paramètres importants à prendre en compte.
Enfin, sur le plan environnemental, ces déchets sont la cause de mortalité de nombreuses espèces ou encore de la destruction de leur habitat.
De plus, si l’on considère que ces déchets peuvent être transportés par les courants sur de longues distances, tous ces coûts peuvent être supportés par des populations qui ne sont pas responsables de leur production.
Quelles solutions ?
Plusieurs solutions sont apportées par le rapport très complet du GESAMP, qui souligne tout d’abord les efforts à réaliser en matière de prévention, d’atténuation et de résolution du problème. Parmi les différentes actions que l’on peut mener, il y a l’amélioration des infrastructures portuaires pour le matériel en fin de vie.
L’amélioration du matériel de pêche à la conception permettrait également d’éviter les pertes en mer. Lorsqu’on utilise le bon matériel pour la bonne utilisation, on réduit les risques. L’éducation et la formation sont aussi des vecteurs importants de sensibilisation.
Enfin, si les opérations de collecte des déchets en mer sont louables, leur efficacité n’est pas toujours optimale. Il faudrait donc systématiser la récupération des objets perdus directement par les navires lors des opérations de pêche par exemple.
Pour ce qui est des déchets rejetés par les navires, la systématisation du tri sélectif des déchets plastiques à bord avec une gestion dans les ports ou encore la création d’infrastructures flottantes ou mobiles de collecte sont avancées par le rapport. Ce dernier rappelle que toutes les initiatives ne sont viables qu’avec un engagement fort de tous les acteurs du secteur. Alors, que chacun prenne ses responsabilités ! Traitons le problème à la source et fermons les vannes de la pollution marine !
Pour aller plus loin : voir notre article sur la pollution chimique des océans.