Que ce soit en Méditerranée, en Manche ou en mer du Nord, le flux de migrants qui tentent d’arriver en Europe ou en Angleterre par la mer connaît une augmentation sans précédent. Une situation terriblement dangereuse, pour les migrants comme pour les sauveteurs. Alors, faut-il professionnaliser le sauvetage en mer des migrants pour éviter les drames ?
Évacuons tout de suite l’impensable : en mer, on se doit de porter assistance à toute personne en danger de mort. C’est la règle, c’est même la loi. La non-assistance en personne en danger est punie d’une peine pouvant aller jusqu’à 5 ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende.
Les solutions pour être le plus efficace possible dans ces sauvetages ?
La réalité est finalement assez simple. Des hommes, des femmes et même des enfants risquent tout (y compris et même surtout leur vie) pour quitter leur pays devenu inhospitalier. Ils quittent leur pays, leurs amis, leurs familles pour des questions de survie, d’exactions contre une minorité ethnique ou religieuse, des problèmes pour se nourrir, des guerres, etc. Et aussi, il faut bien le dire, pour la promesse d’une vie meilleure dans un eldorado lointain et – souvent – fantasmé.
Le souci est que pour arriver dans cette Europe que les passeurs leur ont promise, ils doivent traverser des mers (voir nos articles ICI ou ICI). Les pays de transit sont majoritairement la Libye (pour ceux qui veulent rejoindre l’Europe) ou la France et la Belgique (pour ceux qui souhaitent rejoindre l’Angleterre, ce pays « magique » où l’on peut travailler sans avoir – dit-on – besoin de montrer des papiers en règles)…
On est ainsi passé de 28 500 personnes traversant la Manche sur des bateaux de fortune en 2021 à 41 000 en 2022. La France ne fait, en la matière, pas beaucoup mieux que la Libye et laisse des dizaines de milliers de femmes, hommes et enfants risquer leur vie lors d’une traversée plus qu’aléatoire sur des embarcations qui n’en ont que le nom.
En Manche/mer du Nord, la SNSM (société nationale de sauvetage en mer), qui est en première ligne pour aller récupérer les migrants en détresse, explique à qui veut l’entendre que leurs bateaux de secours ne sont absolument pas conçus pour le sauvetage de radeaux sur lesquels 40 à 70 personnes s’entassent. Le président de la SNSM (Emmanuel de Oliveira) explique ainsi que les trois canots sur zone risquent le chavirage dès que plus d’une quarantaine de naufragés doivent être recueillis à bord…
Alors, on fait quoi ?
L’une des solutions préconisées par les associations qui se retrouvent en première ligne pour ces sauvetages serait de trouver un bateau pensé, conçu et réalisé pour ces opérations bien spéciales. Un cargo transformé en navire de sauvetage fait parfaitement l’affaire. La preuve avec ceux qui naviguent en Méditerranée pour les ONG MSF/ SOS Méditerranée / Sea Watch / Open Arms… Et s’ils ne sont pas optimums, les canots “tous-temps” (CTT) de la SNSM s’en sortent aussi très bien en Manche et Mer du Nord. Mais force est de reconnaître qu’avoir un bateau optimisé pour ce type de sauvetage permettrait d’être bien plus efficace.
C’est là qu’entre une association dans cette histoire. Son nom : PEROU. Son objectif : inscrire le geste d’Hospitalité au patrimoine immatériel de l’humanité. Et quel plus beau geste d’hospitalité, pour un marin, que de sauver ceux qui se noient en mer ?
L’association PEROU a donc invité des architectes, des designers, des marins mais aussi des artistes, des juristes, des étudiants et des chercheurs pour réfléchir à la conception et à la construction d’un navire, nommé « l’Avenir ». Un bateau de sauvetage en mer capable de simplifier la vie des sauveteurs et de sauver celles des naufragés…
Le résultat est étonnant : « Navire Avenir » est un catamaran qui mesurera 69m de long pour 22,3m de large. Il sera propulsé par une motorisation classique mais aussi deux ailes culminant à plus de 50m de haut. En plus de ses deux rampes situées à l’arrière de chaque coque permettant une mise à l’eau facilitée des semi-rigides d’intervention, le « navire Avenir » sera équipé d’une véritable unité de soins d’urgences et une zone d’accueil permettant de recueillir 370 naufragés. Une goutte d’eau quand on sait que 200 millions de personnes, d’après la banque mondiale, risquent de se retrouver à devoir migrer d’ici à 2050 en raison des bouleversements climatiques…
Le premier “Navire Avenir” pourrait être mis à l’eau dès 2025. Une belle avancée, voire une vraie lueur d’espoir pour tous ceux qui risquent leur vie en mer !