Des foils sur le Titicaca !

Lac Titicaca, François Rouvrais
Lac Titicaca, François Rouvrais

C’est le plus grand lac navigable du monde ! Il est partagé entre deux pays, le Pérou et la Bolivie et, même s’ il y en a peu, quelques marins d’eau douce s’y aventurent depuis des siècles. Pour ce faire, ils ont construit leurs propres embarcations, sans être des professionnels du nautisme. On est bien loin des conceptions et constructions normées des pays occidentaux. Toutefois, ces embarcations ont traversé les siècles et font échos aux traditions. Ainsi, seulement côté bolivien, on distingue deux principales embarcations : les ‘botes’ et les ‘lanchas’… parfois équipées de foils !

Le ‘bote’ : entre authenticité et tradition

Les 'botes' du Lac Titicaca, François Rouvrais
Les ‘botes’ du Lac Titicaca, François Rouvrais

Ces petites embarcations très colorées mesurent entre 2 et 4 mètres. Très simples, elles s’apparentent aux barques que l’on peut voir dans nos ports et ne peuvent embarquer guère plus de 5 personnes. Equipées d’un moteur hors-bord ne dépassant pas les 15 chevaux et d’une paire de rames pour les manœuvres en faible profondeur, elles sont majoritairement utilisées par les pêcheurs de truite qui sortent à la tombée de la nuit. Elles sont également très utilisées par les peuples Aymaras vivant sur les îles du lac pour rallier le continent. Chaque famille en dispose un : sur l’île de la Lune qui compte 23 familles, on peut dénombrer un nombre de ‘botes’ similaires. Ce sont les embarcations typiques du lac et les Aymaras, ne disposant pas assez d’argent, construisent eux-mêmes ces embarcations. D’une décennie à l’autre, c’est un véritable savoir-faire qui est transmis.

Le ‘lancha’ : le bateau adapté au développement touristique de la Bolivie 

Un 'lancha' naviguant sur le Lac Titicaca, François Rouvrais
Un ‘lancha’ naviguant sur le Lac Titicaca, François Rouvrais

Ces bateaux sont également typiques du lac Titicaca côté bolivien mais ils sont moins traditionnels. En effet, ils sont apparus avec le développement du tourisme en Bolivie pour répondre à la demande de visiter les îles du lac. Ces bateaux font entre 6 et 10 mètres de long. Equipés d’une cabine abritée, ils peuvent embarquer jusqu’à 30 passagers. Le capitaine est situé à l’arrière du bateau pour manœuvrer les deux hors bord d’environ 40 chevaux : ici, pas de retour à un poste de pilotage équipé d’une barre ou d’un volant. Pour ne rien faciliter, en navigation, la vision du capitaine est obstruée par la cabine et l’ensemble des passagers situés devant lui. Bien que ces ‘lanchas’, qui ressemblent à des vedettes, n’aient rien à voir avec les ‘botes’, leur construction est très similaire et se base sur le savoir-faire traditionnelles des Aymaras.

Comment sont construits ces deux bateaux ?

Structure d'un 'bote', François Rouvrais
Structure d’un ‘bote’, François Rouvrais

C’est la méthode de construction classique en bois qui est utilisée pour ces bateaux. Le bateau est un assemblage de planches de différentes dimensions assemblées les unes à côté des autres. On parle alors de bordage à franc-bord. Quille, varangues, membrures, serres bauquières et barrots composent l’essentiel de la structure de ces bateaux. La mise en forme de ces renforts structurels, notamment des membrures, se fait par immersion du renfort dans un chaudron d’eau bouillante. Ce processus permet alors de courber le bois plus facilement en y exerçant un effort mécanique. Une fois la structure construite et les renforts ayant la forme correspondant à celle de la coque, les planches sont collées à la résine sur cette dernière pour constituer le fond, le bordé et les superstructures dans le cas d’un ‘lancha’. L’étanchéité de la coque est garantie par calfeutrage, effectué à l’aide de tissu glissés entre les planches et maintenu en position par de la résine. La phase finale est la peinture du bateau.

Superstructure d'un 'lancha', François Rouvrais
Superstructure d’un ‘lancha’, François Rouvrais

3 essences de bois sont utilisées pour la construction des ces embarcations ! Tous viennent d’Amazonie bolivienne. En langue locale, ces essences sont le ‘mara’, le ‘nogal’ ou le ‘cidro’. Plus rarement, les Ayamaras utilisent comme essence l’eucalyptus, qui pousse aux abords du Lac et sur les îles. En suivant ce processus de construction, il faut environ 1 mois à un Aymara seul pour construire un ‘bote’ tandis qu’il faut 5 à 6 mois à 2 ou 3 Aymaras pour construire un ‘lancha’.

Mais pourquoi parler de foils dans le titre de l’article ?

Simplement parce que depuis maintenant 30 ans, des ‘lanchas’ plus sophistiqués, construits en aluminium se sont vus équiper d’hydrofoils.

Crillon Tours, Hydrofoil sur le Titicaca
Crillon Tours, Hydrofoil sur le Titicaca

Quelle surprise ! À l’heure actuelle, la technologie du foil fait l’objet de nombreuses études afin d’améliorer notamment les performances des voiliers de courses au large et il s’avère qu’en Bolivie des bateaux vieux de 30 ans l’utilisent aussi ! Bien évidemment en 30 ans les foils ont évolué et sont plus performants mais cette technologie n’est pas nouvelle !

En outre, peu de ces bateaux naviguent sur le lac aujourd’hui mais, l’entreprise Crillon Tours les utilise toujours pour amener ses touristes sur l’île de la Lune.

Avis aux intéressés !

Bien que pour des raisons économiques les ‘botes’ et ‘lanchas’ soient construits de manière amateur par les Aymaras, les habitants de l’île Suriqui sur le lac sont spécialisés dans la construction de ces derniers ! Pour devenir propriétaire d’un ‘bote’ il faut alors débourser 7000 bolivianos soit 1000 euros. Pour un ‘lancha’, il faut compter 70000 bolivianos soit 10000 euros.

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