Le 8 juin 2022, c’est la “journée mondiale des océans”. Depuis 3 ans, les Nations unies déploient à cette occasion toute une communication pour “célébrer l’océan” et rappeler son importance. Décréter une journée mondiale est-il un non événement qui vise à se donner bonne conscience et masque l’échec d’une action collective à l’échelle planétaire ? Ou bien est-ce l’occasion de parler des vrais sujets d’inquiétude autour de la préservation des océans ? Trois sujets semblent incontournables dès lors que l’on veut célébrer l’océan : la pollution plastique, la surpêche et le transport maritime.
“Célébrer l’importance des océans”
Selon la page dédiée du site des Nations Unies, l’objectif de cette journée mondiale est essentiellement une opération de communication. Il s’agit de “sensibiliser le grand public au rôle crucial que [les océans] jouent dans notre subsistance, ainsi qu’aux différents moyens qui existent pour les protéger”. Cette journée permet également de “mieux faire connaître le rôle que les Nations Unies et le droit international jouent dans le développement et l’utilisation durables des océans et de leurs ressources biologiques”.
Le site permet également de recenser les différentes actions menées par les partenaires. On en compte pas moins d’une dizaine entre le 2 et le 8 juin. Des expositions, des conférences ou encore des projections sont organisées de Barcelone à l’Australie en passant par Dubaï. C’est surtout le virtuel qui semble l’emporter. En somme, nous avons l’impression que toute la planète est concernée et que des actions sont menées un peu partout. Mais il semble surtout que tous ces acteurs profitent de cette opportunité pour mettre un coup de projecteur sur leurs projets autour des océans.
Cette initiative est-elle vraiment critiquable ? Au fond, une bonne opération de communication n’est-elle pas nécessaire à une plus grande prise de conscience de l’importance des océans ? N’est-ce pas une occasion de parler des sujets les plus importants ?
La pollution marine : un bilan toujours plus alarmant
Et si les sujets sont nombreux, celui de la pollution marine, notamment au plastique, figure en pôle position. Les rapports se suivent et se ressemblent et celui publié par WWF le 8 février dernier est particulièrement alarmant. Ce rapport, qui se veut être le plus complet existant sur le sujet, estime que la quantité de plastique dans les océans devrait quadrupler d’ici 2050. Aujourd’hui, la contamination a déjà atteint “toutes les parties des océans, de la surface aux grands fonds marins, des pôles aux côtes des îles les plus isolées”. Et presque toutes les espèces ont pu être en contact avec des débris plastique.
La WWF appelle les Nations unies à négocier un traité mondial sur cette question. Une action globale contre les plastiques à usage unique serait en effet la seule solution pour tenter de limiter les prévisions catastrophiques. Quand on sait que la pollution plastique représente 60% de la pollution marine, on ne peut que comprendre l’inquiétude… L’association estime que l’approche actuelle est un échec et que “des solutions systémiques pour stopper la pollution plastique à la source” sont indispensables.
La surpêche ou la boulimie humaine
Autre sujet, autre combat. On le sait, l’homme est le plus grand prédateur sur la planète. Les ressources halieutiques ne sont pas épargnées par la boulimie humaine. Le 2 mai 2022, la France a consommé la totalité de sa production locale de pêche et d’aquaculture. Une date certes symbolique, mais qui constitue un nouveau signal fort. Le principe est basé sur la “date du dépassement” publiée chaque année par l’ONG américaine Global Footprint Network. Mais avec une consommation de 33,5 kg de poisson par an et par habitant en France, il faudra donc importer les deux tiers de la consommation du pays sur une année. L’hexagone dépasse largement la moyenne mondiale qui se situe à 20,5 kg par habitant.
Selon le dernier rapport de l’Organisation des Nations Unies pour l’Alimentation (FAO), daté de 2020, la France totalise 5% des importations mondiales de produits aquatiques. Elle possède pourtant le 2e domaine maritime de la planète. La FAO souligne également l’augmentation continue de la production alors que les stocks ont de plus en plus de mal à se renouveler. De quoi réfléchir encore à nos pratiques…
Le transport maritime : des solutions en discussion
Ce dernier sujet est aussi une source de préoccupation majeure à l’échelle planétaire. Et si des prises de conscience d’une rationalisation de nos pratiques semble commencer à porter leurs fruits, les enjeux sont particulièrement importants. En effet, les derniers rapports du GIEC ou des Nations unies soulignent que le transport est responsable de près du quart des émissions de gaz à effet de serre. Et le transport maritime se retrouve en bonne place, avec 80% des flux physiques d’échanges de marchandises.
Le rapport thématique du gouvernement français intitulé “Prospective 2040-2060 des transports et des mobilités”, publié en février 2022, prévoit une neutralité carbone dans le transport maritime à horizon 2050. Bien qu’il rejette le recours à une réduction de vitesse des navires, le rapport s’appuie sur l’étude et les prévisions des avancées technologiques en matière de propulsion (voir notre article sur la mobilité zéro émission). Le rapport souligne cependant que des incertitudes subsistent quant aux coûts associés ou à la nature des flux de matière engendrés par la production d’énergies décarbonées, faute de données fiables.
Ainsi, les sujets ne manquent pas et les actions doivent évidemment se poursuivre au-delà de cette journée du 8 juin. Les piqûres de rappel pour une prise de conscience la plus large possible sont toujours nécessaires. Posons-nous les bonnes questions pour améliorer nos pratiques de consommation et contribuer à sauvegarder les océans, c’est là le vrai message de la journée mondiale des océans.